- Publisher: 160 p.
- Editor: Editions Téthys
- Edition: Edition de 2008, à l'occasion du centenaire de la publication
- Available in: Electronique (pdf)
- ISBN: 9782 74170 3761
Prévention de la maladie de décompression
En juin 1908 paraissait, dans The Journal of Hygiene (Cambridge University Press) un texte de cent pages, aujourd’hui devenu culte, intitulé The Prevention of Compressed-air Illness. Cette publication allait bouleverser, dès sa parution, les modalités de la décompression en plongée.
John Scott Haldane, en collaboration avec A.E. Boycott et G.C.C. Damant, venait d’établir les premières tables de plongée, ouvrant ainsi la voie à une décompression plus sûre, dans la droite ligne des travaux de Paul Bert (La Pression barométrique) publiés trente ans plus tôt.
Ce livre est la traduction française de cette publication fondatrice augmentée d’une introduction sur l’histoire de la décompression (désaturation).
La presse en parle
Souvent évoqué, ce texte fondateur demeurait pourtant mal connu et, osons le dire, était la plupart du temps évoqué à tort et à travers […]. Le mérite d’Alain Foret est d’avoir pris le sujet à bras-le-corps en allant au fond des choses. […] Saluons également l’introduction, remarquable d’intérêt et de concision.
Subaqua – Revue de la FFESSM
Contexte
C’est entre 1905 et 1908 que Haldane s’intéresse à la plongée comme objet de recherche scientifique. Nommé membre de l’Admiralty Committee on Deep-Water Diving, l’Amirauté compte sur ses grandes connaissances sur les gaz et la respiration pour résoudre les problèmes de la plongée profonde. Pour réaliser ses expérimentations, John Scott Haldane s’entoure du Dr A. E. Boycott et du Lieutenant G. C. C. Damant.
Pour Haldane, le principal défi est de trouver un autre moyen qu’une « décompression lente et uniforme » pour éviter le risque de formation de bulles pathogènes à la remontée. En 1905, c’est la seule solution proposée :
- Hill et Greenwood sont remontés avec succès de 50 m à la surface à la vitesse de 0,5 m/min (Heller, Mager et von Schrötter), soit une durée de remontée de 1h40.
- Paul Bert recommande une « décompression suffisamment ralentie », de l’ordre de 30 minutes pour une plongée à 20 m (0,6 m/min) et d’une heure pour une plongée à 30 m (0,5 m/min).
- Denayrouze préconise une vitesse de remontée de 1 m/min, avec une limitation des plongées à 35 m de profondeur pour une durée maximum de 2h30 au fond.
Cette approche n’est pas satisfaisante car :
- elle rend les remontées tellement longues qu’elle interdit, dans les faits, les plongées profondes (en 1905, c’est un objectif militaire pour la Royal Navy) ;
- elle impose la même durée de remontée quelque soit le temps d’exposition au fond, alors même qu’il est déjà prouvé à l’époque que le risque d’accident augmente avec la durée de l’exposition et reste faible pour de courtes expositions.
Or, le courrier de la Royal Navy de 1905 est sans ambigüité : en créant une commission sur la plongée profonde, elle souhaite qu’une solution fiable et opérationnelle soit trouvée pour les plongées jusqu’à 55/60 m. Haldane doit donc être innovant et trouver un autre procédé.
Analyse faite par Haldane
Dans un premier temps, Haldane combat, sur le plan scientifique, le principe même des remontées lentes et uniformes : « Pour éviter le risque de formation de bulles lors de la décompression, il était recommandé jusqu’ici que celle-ci soit aussi lente et uniforme que possible. » Il démontre que, pour les plongées profondes, une « décompression uniforme à ce rythme, déjà dangereuse pour les chèvres, serait sans doute extrêmement dangereuse pour les hommes, qui désaturent nettement plus lentement que les chèvres ».
Haldane tente ensuite de trouver une nouvelle méthode de décompression (désaturation). Sa réflexion s’appuie sur un constat unanimement partagé à l’époque y compris par Paul Bert : « Ceux qui ont l’expérience du travail dans de l’air comprimé le savent bien, il n’y a pas de risque de mal des caissons, même avec une remontée très rapide, pourvu que la pression atteinte ne dépasse pas une certaine valeur. Il semble parfaitement clair qu’aucun symptôme n’apparaît lorsque la pression relative est inférieure à une atmosphère [10 mètres de profondeur], quelle que soit la durée d’exposition. » Dit autrement, Haldane constate qu’il est possible de passer de 2 bars (10 m de profondeur) à 1 bar (niveau de la mer) sans risque quelle que soit la durée d’exposition.
Il va alors étendre ce raisonnement à toutes les zones de profondeur : « Par conséquent, il semble probable que, si une décompression brusque de deux atmosphères de pression absolue à une est sans danger, il doit en être de même de quatre atmosphères absolues à deux, de six atmosphères absolues à trois, etc. Nos expériences, décrites en détail plus loin, ont montré que c’était le cas. Le processus de désaturation peut, par conséquent, être très fortement accéléré en réduisant rapidement la pression absolue de moitié, et en faisant en sorte que, pour le reste de la décompression, la saturation ne puisse jamais atteindre, dans aucune partie du corps, plus du double de la pression de l’air. Le principal avantage de cette méthode est que, dès le début de la décompression, l’élimination d’azote par les tissus se fait à la vitesse la plus élevée possible sans danger. »
Haldane aboutit ainsi à la création de la remontée par paliers avec la prise en compte de la pression et de la durée d’exposition pour déterminer la profondeur et le temps des paliers :
« Cette méthode simplifie grandement le problème de la sécurité de la décompression, et supprime de nombreuses difficultés pratiques, en particulier en ce qui concerne la plongée profonde. On peut la qualifier de méthode de décompression par paliers, et elle est décrite comme telle ci-après, bien que sa caractéristique essentielle ne réside pas dans le fait que la décompression est effectuée par paliers, mais en ce qu’elle est rapide jusqu’à ce que la pression absolue soit diminuée de moitié et poursuivie lentement ensuite. »
Tables de Haldane
Caractéristiques de ces tables
Présentation
- Elles calculent une désaturation jusqu’à 62 m (contrairement à ce qui est répandu sur le web, Haldane n’a jamais proposé de tables jusqu’à 100 m). Cette limite de 60 m n’est pas imposée à Haldane par la narcose mais par la limite de puissance des pompes alimentant les scaphandriers et par la lettre de mission de la Royal Navy de 1905 (« (a) Improvements to enable men to dive in 30 fathoms of water … » – 30 fathoms [brasses] = 55 m, il est allé jusqu’à 34 ftm).
- Deux tables ont été publiées, l’une pour les plongées d’une durée « normale » [temps total de remontée : 32 min.], l’autre pour les plongées « au-delà d’une durée normale » [temps total de remontée : de 42 à 238 min.]
- La vitesse de remontée est de l’ordre de 10 m/min avec une variation selon que l’on plonge plus ou moins profond (plus rapide pour les plongées profondes, plus lente à l’approche de la surface), ce qui est une approche toujours d’actualité de la vitesse de remontée :
- 6 à 8 m/min jusqu’à 20 m de prof. max. ;
- 10 m/min pour les plongées entre 40 et 20 m de prof. max. ;
- 10 à 14 m/min pour les plongées entre 60 et 40 m de prof. max.
Les 10 hypothèses retenues par Haldane
De nombreux sites web diffusent de fausses informations concernant les hypothèses de Haldane. Afin de clarifier ce point, voici les 10 hypothèses réellement retenues par Haldane , avec en référence le numéro de page correspondant à la publication originale de 1908 dans The Journal of Hygiene.
- Au niveau des poumons, l’excès d’azote est transmis instantanément au sang (p. 345).
- Au niveau des poumons, lors de la décompression, à chaque cycle circulatoire, le sang transmet instantanément aux poumons la proportion d’azote en excès qu’il contient (p. 351).
- Au niveau des tissus, l’excès d’azote est transmis instantanément (p. 345).
- La pression partielle d’azote dans l’air alvéolaire est la même que dans l’air inspiré (p. 345).
- Les tissus ont tous une constitution similaire à celle du sang hormis la graisse, qu’il traite différemment (p. 346).
- Un cycle circulatoire a lieu en 1 minute (p. 348).
- La courbe de désaturation est miroir de la courbe de saturation (p. 350).
- Le rapport de pression ne doit pas dépasser 2 :1 (p. 357). Ce qui correspondrait aujourd’hui à fixer un Sc=2. Haldane fixe un Sc unique pour tous les compartiments.
- Les phénomènes de charge et de décharge en azote dans le corps humains peuvent se résumer à 5 compartiments (régions anatomiques factices) dont les périodes (demi-vie) sont : 5, 10, 20, 40 et 75 minutes (p 363).
- Le temps de descente est inclus dans le temps de plongée (p. 367). La durée d’exposition virtuelle considérée est la durée d’exposition fond réelle, augmentée de la moitié du temps de descente (p. 350).
Autres apports de Haldane
Au-delà de la création de la décompression par paliers, Haldane se livre, tout au long de la publication, à différents constats fort intéressants :
- Il préconise de bouger les bras et les jambes aux paliers afin d’éviter que les conditions de la désaturation soient très différentes de celles de la saturation (p. 367) ;
- L’âge et l’embonpoint apparaissent comme favorisant les accidents (p. 368) ;
- La vitesse de remontée de l’ordre de 10 m/min est déterminée empiriquement (p. 370) ;
- Il aborde la notion de facteurs spécifiques à chaque individu et variables d’un jour sur l’autre pouvant venir contredire le modèle de décompression [nous parlons aujourd’hui de facteurs favorisants] (p. 384) ;
- Il signale la présence de bulles sans symptômes (p. 411) [nous parlons aujourd’hui de « bulles silencieuses »].
Public pouvant être intéressé par cette publication
- Personnes intéressées par les modèles de désaturation et qui souhaitent savoir ce que Haldane, souvent cité à tort et à travers, avait réellement écrit sur le sujet.
- Stagiaires MF2.
Vous pouvez accéder à la version originale de ce texte, en anglais, parue dans le volume 8 du Journal of Hygiene. Cliquez ici pour y accéder.
Remerciements : Cambridge University Press pour l’autorisation de traduction.
SOMMAIRE
AVANT-PROPOS
INTRODUCTION
Mise en perspective historique, recherches sur la maladie de décompression, des origines à 1908
Les chambres de pression
Les cloches à plonger
Les appareils Triger
Les scaphandres
La recherche s’organise
Paul Bert, père de la physiologie du scaphandrier
PRÉVENTION DE LA MALADIE DE DÉCOMPRESSION
Traduction du texte de Boycott, Damant et Haldane
Introduction
1ère Partie : Théorie
A. Vitesse de saturation du corps en azote pendant une exposition à de l’air comprimé
B. Vitesse de désaturation du corps pendant et après la décompression
C. Limites de la sécurité lors de la décompression
D. Mesures pratiques pour prévenir la maladie de décompression
2ème Partie : Expérimentations
1. Appareils
2. Choix des animaux expérimentaux
3. Échanges respiratoires chez les chèvres
4. Méthodologie de conduite des expérimentations
5. Symptômes observés chez les chèvres
6. Résultats des expérimentations sur les chèvres
7. Différences de sensibilité individuelle, parmi les animaux utilisés, à la maladie de décompression
8. Pathologie de la maladie des caissons chez les chèvres
Résumé
Annexes
BIOGRAPHIE DES AUTEURS
John Scott HALDANE
Guybon Chesney
Castell DAMANT
POSTFACE
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